En 2012, la Suisse demeure le pays qui affiche la liberté économique la plus élevée en Europe; elle se situe au quatrième rang mondial. C’est ce que montre le rapport annuel de l’indice de liberté économique, qui est publié en Suisse par l’Institut Libéral depuis sa première édition en 1996. Au niveau international, l’indice s’est légèrement repris à 6,83 points, contre 6,79 l’année précédente (sur une échelle de 1 à 10). Cela constitue une légère inversion de tendance, après que l’indice avait sensiblement régressé depuis 2007. L’an dernier il avait atteint l’un des plus bas niveaux de ces 30 dernières années. La réduction de la liberté économique depuis le début de la crise financière contraste avec l’évolution positive qui s’était poursuivie durant les années 1980 et 1990.
Hong Kong est à nouveau la juridiction qui connaît la liberté économique la plus élevée au monde. Elle est suivie de Singapour et de la Nouvelle-Zélande. Pour la première fois cette année, des représentants des cinq continents se trouvent parmi les 10 pays les plus libres de la planète. Le Zimbabwe, Myanmar et le Venezuela ferment la marche des pays les plus réprimés.
L’indice de liberté économique, conceptualisé par le lauréat Nobel Milton Friedman, est produit par l’institut canadien Fraser en coopération avec 90 institutions indépendantes dans le monde (dont l’Institut Libéral en Suisse) et fait figure de référence scientifique en la matière. Il évalue le cadre institutionnel d’un pays sur la base de 42 indicateurs et établit ainsi le classement des pays examinés. La liberté économique est mesurée dans cinq domaines: (1) l’ampleur de l’activité de l’État, (2) la primauté du droit et la sécurité de la propriété privée, (3) la stabilité de la monnaie, (4) le libre-échange international et (5) la densité réglementaire.
Le rapport illustre une nouvelle fois le lien étroit entre la liberté économique et la prospérité. Le quartile des pays les plus libres affiche un produit intérieur brut (PIB) par habitant de 37.691 dollars, le quartile le plus réprimé de seulement 5.188 dollars. Les 10% de la population les plus pauvres dans les pays les plus libres génèrent un revenu par habitant de 11.382 dollars, contre 1.209 dollars pour la même catégorie dans les pays réprimés. Le revenu moyen des 10% de la population les plus pauvres dans les pays riches est ainsi deux fois plus élevé que le revenu moyen total des pays réprimés.
La liberté économique rend l’humanité plus prospère. Elle est le meilleur remède contre la pauvreté. La liberté ne peut cependant être réduite à la richesse: les résidents de pays libres économiquement sont aussi en meilleure santé, vivent plus longtemps, bénéficient d’une meilleure formation, de davantage d’égalité en droit ou de droits politiques.
La liberté économique, antidote contre les crises
Le rapport annuel 2012 de l’indice de liberté économique examine pour la première fois, entre autres thèmes, le lien entre la liberté économique et les crises bancaires. Les résultats empiriques de l’analyse contredisent de nombreuses réactions populaires à la dernière crise financière, attribuée à la déréglementation des marchés financiers: d’une part, une densité réglementaire élevée, en particulier une garantie étatique des dépôts étendue, augmente la probabilité d’une crise bancaire; d’autre part, une charge réglementaire et fiscale excessive retarde l’assainissement et la reprise de l’économie. L’analyse historique arrive à la conclusion qu’un gain de liberté économique de l’ordre d’un point de l’indice diminue la probabilité d’une crise bancaire de trois points de pourcentage.
Inversement, les données historiques montrent qu’une crise bancaire est régulièrement suivie d’un recul marqué de la liberté économique. Cela suggère une interprétation systématiquement fausse des crises bancaires au sein du public, ce qui mène à des décisions politiques contreproductives. L’affaiblissement de la liberté économique suite à une crise augmente en effet la probabilité d’une nouvelle récession. Les analyses actuelles de l’indice de liberté économique sont donc peu rassurantes: la fuite en avant réglementaire et fiscale depuis 2007 dans une grande partie du monde a rendu le monde moins sûr. Ce qui serait requis: un renforcement de la liberté économique, afin de renouer au plus vite avec une croissance saine.
D’autres analyses sur la base des données actuelles de l’indice documentent l’influence positive de la liberté économique sur l’indépendance économique: les pays avec une charge réglementaire et fiscale moins lourde affichent un degré plus élevé d’initiative entrepreneuriale au sein de la population. Un degré plus élevé d’entrepreneuriat augmente à son tour la productivité des facteurs d’une économie et conduit ainsi à davantage de prospérité. La liberté économique permet de mieux surmonter les crises de cette manière également.
Classement de la Suisse et comparaison internationale
Comme toujours, pour permettre les comparaisons internationales et disposer des données nécessaires, l’indice 2012 se fonde sur les conditions prévalant deux ans auparavant. La Suisse a obtenu les évaluations suivantes dans le rapport de cette année (sur une échelle de 1 à 10, où 10 représente la valeur la plus élevée de liberté économique):
- Ampleur de l’activité étatique: léger affaiblissement de 6,80 l’an dernier à 6,79
- Primauté du droit et sécurité de la propriété privée: faible amélioration de 8,72 l’an dernier à 8,76
- Stabilité de la monnaie: augmentation de 9,29 à 9,39
- Libre-échange international: forte diminution de 7,27 à 7,06
- Densité réglementaire: amélioration de 8,08 à 8,31
Parmi les dix pays les plus libres du monde figurent à la suite de Hong Kong (8,90 points), Singapour (8,69), la Nouvelle-Zélande (8,36) et la Suisse (8,24) également l’Australie et le Canada (tous deux 7,97), Bahreïn (7,94), l’Île Maurice (7,90), la Finlande (7,88, premier pays de l’Union européenne) et le Chili (7,84).
Parmi les autres économies importantes, le Japon arrive au 20e rang (7,64), l’Allemagne au 31e rang (7,52), la France au 47e rang (7,32) et l’Italie au 83e rang (6,77). L’économie montante de l’Inde ne se place qu’en 111e position (6,26), alors que la Chine la précède au 107e rang (6,35). Le Brésil figure au 105e rang (6,37), la Russie au 95e rang (6,56). Cela souligne le potentiel substantiel de rattrapage que recèlent encore ces pays.
Quelques pays africains ont pu améliorer sensiblement leurs conditions sur la dernière décennie: entre l’an 2000 et aujourd’hui, le Rwanda a notamment passé du 106e au 44e rang, Malawi du 114e au 84e rang et le Ghana du 101e au 53e rang. Quelques États européens anciennement socialistes très en retard ont également pu rehausser leur statut de façon spectaculaire sur la même période: ainsi la Roumanie a passé du 110e au 42e rang, la Bulgarie du 108e au 47e rang et l’Albanie du 77e au 32e rang.
Certains des pays les plus pauvres continuent d’afficher un déficit marqué de liberté économique. Le Venezuela est le pays le plus réprimé du globe (sans compter les dictatures entièrement dominées par l’État pour lesquels il est impossible d’établir un indice, comme la Corée du Nord et Cuba). Il est précédé de Myanmar, du Zimbabwe, de la République de Congo et de l’Angola. Parmi les pays qui ont connu le recul le plus drastique depuis l’an 2000 se trouvent cependant aussi des États occidentaux: les États-Unis, en particulier, ont passé du 2e au 19e rang et l’Islande a passé du 11e au 59e rang, alors que le Venezuela a passé du 94e au 123e rang et l’Argentine du 34e au 110e rang, soulignant la grande instabilité tant économique que politique qui a caractérisé ces dernières années.
Lire le rapport:
Economic Freedom of the World
(322 pages, PDF)